LE HAVRE

Encore un titre à laisser pantois (Surtout ceux d'entre vous qui (re)connaitront les lieux) . . .

Je le con-cède et m'en amuse. D'autant mieux. Que je n'ai jamais foutu un pied au Havre.^^

Il est de ces endroits que l'on voudrait garder secrets. Que l'on voudrait garder pour soi.  

Égoïstement. "Loin de vos yeux, plus près de mon coeur" pourrait être l'adage. Et pourtant . . .    Il est de ces lieux, comme de ces gens, qu'on aime "en Agapè" ("En partage", si vous voulez).

C'est le cas de mon (Ahhh, la possessivité . . . ^^) Havre. De mon navire du fond des âges.

Mon séant, mon asile, ma forteresse . . . Mon fondement, ma Presque-île. Mon sot-l'y-laisse.^^

"Basiquement", c'est un village. ( "Moun vilage" ) Accessoirement celui. Qui m'a vue être.

Face à la mer (Pas pire.^^) - Mâte le tableau -  Refuser de grandir, Calo.*

* "Comme Cosette pour Hugo ( . . . ) Rêver de déchirer l'tableau ( . . . ) Face à la mer, j'aurais pu grandir" Calogero

Le Sansot " Une fenêtre sur le Passé " © Matin-Rouge 2015
Le Sansot " Une fenêtre sur le Passé " © Matin-Rouge 2015

Derrière moi le passé simple des "Gens de peu". . . Face à moi les fenêtres - closes - du "Sansot". Je veux croire qu'il s'agit d'un hommage à Pierrot. L'écrivain philosophe de la proche "banlieue", qui souffle encore à mon oreille: "Moderato Cantabile" ! (Que Marguerite me pardonne cette infidélité.) 

 

". . . le véritable lieu urbain est celui qui nous modifie. Nous ne serons plus en le quittant celui que nous étions en y pénétrant." © Pierre Sansot "Poétique de la Ville"


Tourrettes sur Loup " Face Ouest, un jour d'Orage " © Matin-Rouge 2015
Tourrettes sur Loup " Face Ouest, un jour d'Orage " © Matin-Rouge 2015

"Authentique bourg médiéval" doit-on pouvoir lire quelque part . . . Pittoresque s'il en est un. Littéralement : "Digne d'être peint." Maison de Prévert et de Modigliani. À cet âge sans pitié, accueillait les gueux au Paradis. "Paradis? Tu t'emballes. . ." Vrai. Un peu de Bolduc et c'est gagné.

 

But yeah . . . En 1942 naissaient à Tourrettes sur Loup - En pleine occupation allemande, donc - "Les Enfants du Paradis". Prévert, Kosma, Carné . . .À deux pas de l'âge tendre, le mythe ! Et 13 ans plus tard, un autre monstre sacré dans les rues de moun pais : Alfred Hitchcock, please !!! Accompagné de Grace Kelly pour "La Main au Collet" (Si ça vaut pas son pesant de cassoulet. . .).

 

"Paisot de moun enfanco", vaisseau pétrifié par les siècles (Et pour les siècles à venir, Amen), les vents, et la fougue marine. Combien de têtes (Et de films, eheh^^) n'as-tu tournés ? Sauvageonne au pays des touristes, combien de zèbres enamourés ? 

" L'Ancienne Gare " © Matin-Rouge 2015
" L'Ancienne Gare " © Matin-Rouge 2015

"L'Ancienne Gare". C'est ainsi qu'on la nomme depuis des décennies . . . Sept décennies, pour être exact. À compter du 24 août 1944. À cinq heures pétantes de la matinée. Où les troupes allemandes en retraite ont littéralement "coupé les ponts" de moun pais. Aucun n'a jamais été reconstruit. Ni le Viaduc du Loup, ni celui de Pescaressa, où l'on n'a jamais pêché que des grenouilles. Et la gare actuelle devint : "L'ancienne gare des Chemins de Fer de Provence". Jamais elle ne figura sur aucun guide touristique. À peine l'évoque-t-on entre deux souvenirs . . .

 

(Les 15 et 16 août 1938, Christian-Jaque y tourna des scènes d'"Ernest le Rebelle" avec Fernandel. Les cactus et autres agaves qui jalonnaient la voie lui donnaient de faux airs de Mexique . . . )


Mais il s'y est joué bien d'autres films. . . Et nombreuses sont les histoires qui sont contées. . . De celles que vécurent les compagnons de la cambrousse (Sourire). Dont j'étais. À cet âge merveilleux où l'on est assez fou pour inventer. Une langue qu'aucun adulte ne parlera jamais. . .

Plus que les figues de barbarie à nos braves palais, et autres cactacées mues en armes fatales: les oliviers . . . Pelisses opales et chandails argentés. Eût-il fallu être poète pour en saisir toute la beauté . . . Car ici on ne plante pas de forêt(s). On plante des maisons autour des olivaies . . . Et leur tronc pousse en nos demeures . . . Et je pense à Peter (Pan) au pays de Nulle Part: Where "a Never tree tried to grow". Ici les arbres ont grandi. Les enfants que nous étions aussi.

Combien de cache-cache entre loves et Loup ? D'expéditions un peu partout. . . Loves ? Loup ???

Loves, oui. Nous étions jeunes et nous voulions aimer (Clin d'oeil). But it has nothing to do with the price of the rice (Uh-uh), à dire vrai. Les "loves" (Également écrit : "Lauves"*, mais c'est moins cute.^^)  sont des roches formées par sédimentation dans la mer. (Si si) À la formation des Alpes, ces fonds marins se sont retrouvés à plus de 300m d'altitude. (Amazing, huh?) L'aspect de ces roches nous faisait penser à de la "lave". De quoi aiguiser nos esprits émoussés.


Les loups, on n'en a jamais vu dans les parages. Ils ont pourtant donné leur nom au fleuve qui coule en la commune des jours paisiblement heureux. (Seules quelques "crovettes" blanches pourraient me contredire. Mais si les crevettes avaient la parole ça se saurait . . . ^^)

* Lauve : Étymologie incertaine. Viendrait du provençal "Laouve" ou d'un mot celtique signifiant : Dalle de pierre. 

" In love " 1 © Matin-Rouge 2015
" In love " 1 © Matin-Rouge 2015
" In love " 2 © Matin-Rouge 2015
" In love " 2 © Matin-Rouge 2015
" In love " 3 © Matin-Rouge 2015
" In love " 3 © Matin-Rouge 2015

Comme dit, (Elle n'aurait pas tendance à se répéter ?^^) les loves/lauves sont des bancs calcaires déposés par la mer primitive. (Mer qui est à 25km aujourd'hui, faut-il le rappeler . . . )


«  La montagne n’a pas toujours été là. A l’ère secondaire, l’affaissement du sol hercynien fut envahi par la mer alpine, des sédiments s’accumulèrent en couches épaisses, où furent emprisonnées moult espèces marines. Au Tertiaire, le rapprochement des plaques tectoniques de la Terre souleva le socle ancien, entraînant l’eau vers la Méditerranée, tandis que les sédiments glissaient sur les pentes. En séchant, ils se solidifièrent. Aujourd’hui, des coquillages parsèment les roches lisses qui font penser à de grandes coulées de lave grise. »


Par endroits (Au Sud du village), l’érosion a fait son oeuvre. Elle a raviné les énormes rochers en ce que nous appelions alors des  "Dos d’éléphant". Entre pachydermes et loups, décidément . . . ^^

Bidens pilosa. L'Herbe à Sornettes (No joke), comme on l'appelle familièrement. Et cela fait des siècles qu'elle se venge, en s'agrippant aux basques des bipèdes en chemin. Petit astre (Plante de la famille des Asteraceae) végétal aux épines amovibles, persécutant les terrestres textiles. 


La Bidens pilosa est une adventice* cosmopolite. Originaire d’Amérique du Sud, on en trouve généralement en Afrique subsaharienne . . . Peut-être (Qui sait ?) au vu des éléphants, s'est-elle sédentarisée ?^^ À moins que les cactus . . . Ahhh, Bidens Rebela. Le sobriquet c'est pour moi. : - )

* Une adventice désigne une plante qui pousse dans un endroit où elle n'est pas censée se développer . . .

 

" ( . . . ) Rouge-gorge, mon ami, qui arriviez quand le parc était désert, cet (hiver) votre chant fait s'ébouler des souvenirs. ( . . . ) " © René Char

 

Tourrettes. Ah, Tourrettes. Capitale de la Violette, le saviez-vous ? Et qu'on ne me parle pas de Toulouse, surtout. (Tirage de langue décomplexé.^^) "Candiflor, le seul fabriquant toulousain des violettes cristallisées - les fameux bonbons nommés "Violettes de Toulouse" - importe en majorité ses fleurs auprès des producteurs de Tourrettes sur Loup." Tourrettes, disions-nous . . . Modeste village de 4000 âmes, cultivant la petite fleur depuis le XIXème siècle. ("Seul village en France où cette fleur est cultivée comme culture unique ou principale." Pense-t-elle nécessaire de préciser.^^) Ceci étant dit, laissons rosir Toulouse et Tourrettes fêter, la Viola Odorata. . .  : - ) 

"La Reine Victoria" © Matin-Rouge 2015
"La Reine Victoria" © Matin-Rouge 2015

Dieu qu'elle est belle ma Constantine pourpre, aux aloès succulentes. Qui inspira Amadeo Modigliani, Francis Poulenc, Lanza del Vasto, Jacques Prévert . . . Qui fit tourbillonner des gens sans mémoire* . . . Pourtant "l’Histoire est passée, sur Tourrettes comme sur tous les villages de France. Rien ne lui a été épargné, ni les guerres, ni les épidémies, ni les calamités en tous genres . . . La misère a longtemps habité ici. Chaque pierre, chaque buisson en a gardé la trace. Tout s’inscrit dans un lieu, le bon et le mauvais. Le bonheur et le malheur laissent des signes dans le sol, sur les rochers, même dans l’air pourtant régulièrement balayé par les vents. C’est une marque indélébile comme celle que trace la suie sur les murs d’une vielle masure, ou celle que laissent les cierges à l’intérieur d’une église." Des traces indélébiles . . . 

* Gérard Philippe, notamment, dans "La Clé des Songes" de Marcel Carné . . .

 

Moi j'avais une lampe - et toi la lumière ? © Jacques Prévert




Elle s'appelle George (En hommage à Sand . . . ) Elle sculpte la métamorphosedans le bronze. 

Elle me rappelle un autre Peter. (Gabriel.) et cette magnifique chanson : "My body is a cage" . . .

 

" Dans ton cul ? " © Matin-Rouge 2015
" Dans ton cul ? " © Matin-Rouge 2015
" Cuir de Saumon " © Matin-Rouge 2015
" Cuir de Saumon " © Matin-Rouge 2015
" Adieu : Veaux, Vaches, Saumons " © Matin-Rouge 2015
" Adieu : Veaux, Vaches, Saumons " © Matin-Rouge 2015

" Turn my swag on " © Matin-Rouge 2015
" Turn my swag on " © Matin-Rouge 2015
" Derrière les barreaux, le Vaste Nord " © Matin-Rouge 2015
" Derrière les barreaux, le Vaste Nord " © Matin-Rouge 2015

Les murs prolifèrent. Même ici. Tristes reflets de ceux qui se sont sournoisement érigés dans nos têtes ahuries. "Faîtes le mur". (Banksy) Faites tomber les barrières. Les murs prolifèrent mais l'horizon est infini. 


" Tourrettes sur Loup au soleil couchant " © Matin-Rouge 2015
" Tourrettes sur Loup au soleil couchant " © Matin-Rouge 2015

In memoriam

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Commentaires: 9
  • #1

    Clairvie (vendredi, 13 février 2015 16:50)

    Je remercie le hasard qui m'a amenée jusqu'ici. Votre blog est un ravissement pour les pupilles. Une heure que je m'y balade et j''en viens déjà à regretter que vous n'écriviez pas davantage. Au plaisir de vous lire. Bien amicalement. Clairvie

  • #2

    ben (dimanche, 15 février 2015 09:52)

    Trop trop beau !! T'avais pas dit que tu renonçais aux cours de photos ? T'as bien fait de continuer elles sont sublimes ! J'envoie le lien à Bagaria. :p Et je t'attends de pied ferme au pays.

  • #3

    Le Marginal Magnifique (dimanche, 15 février 2015 14:26)

    Éh, ça y est, j'ai envie d'aller à Tourettes-sur-Loup maintenant ! Curieux, je n'avais jamais prêté attention à ce village. : heureusement que Matin-Rouge existe pour nous le faire découvrir en culture, beauté et poésie ;-).

  • #4

    Manon (dimanche, 15 février 2015 19:49)

    J’adore. C’est sublime !!!!! Le lieu, les couleurs et tes souvenirs. Je veux ton village et ton appareil photo ok ? C’est du du grand art. Merci pour le partage. Tu veux bien juste m’expliquer ce passage : « Car ici on ne plante pas de forêt(s). On plante des maisons autour des olivaies . . . Et leur tronc pousse en nos demeures . . . » ?

  • #5

    Nicodeloin (lundi, 16 février 2015 12:42)

    Beau, frais et riche en détails.

  • #6

    Menica (lundi, 16 février 2015 18:31)

    Le monde a la beauté du regard qu'on lui porte. Merci

  • #7

    matin-rouge (mardi, 17 février 2015 08:20)

    @Clairvie : Merci pour les compliments, déjà. Vous remercierez le hasard pour moi. (Sourire) Quant au fait d’écrire davantage, vous allez rire mais en l’espèce : le plus est l’ennemi du bien. ; - ) Au plaisir !

    @ben : Merci m’sieur.
    - J’ai bel et bien « renoncé » aux cours photos. À ceci près qu’il ne s’agit pas d’un renoncement mais d’un choix. Honnêtement, en perdant la spontanéité j’avais perdu l’envie et le plaisir. Il y aura donc encore beaucoup de photos ratées.^^ Et beaucoup d’occasions de m’améliorer. : - )
    - Mèfi falabrac. Mèfi ! :p

    @LMM : Merci ! Est remarquable tout ce qui est remarqué. : - )
    Contente d’avoir éveillé en toi une curiosité . . .

    @Manon : Merci pour les compliments teintés d’enthousiasme.
    - « Mon » village appartient à tous ceux qui le font vivre. : - ) Pour ce qui est de l’appareil photos je crains que ce ne soit pas possible.^^ Mais je veux bien prêter mes yeux. : - )
    - Les oliviers sont sacrés, ici, il faut le savoir. Il existe une loi qui interdit de couper, pour quelque raison que ce soit, un olivier. (Au cas échéant, les contrevenants s’exposent à de lourdes amendes.) Donc en admettant qu’on achète un terrain constructible complanté d’oliviers, il faudra s’adapter à mère nature (D’où le succès des cours intérieures.^^). C’est ce qui explique également qu’en dépit du « bétonnage » de ces dernières décennies, l’ « arrière-pays » ait réussi à préserver quelques « terrains ». Reste, comme le suggérait Giono, à en planter partout où c’est encore possible. : - )

    @Nicodeloin : Apprécié. Fort. ; - )

    @Menica : Gramassi a tui.

  • #8

    Delphine (mercredi, 01 février 2017 18:53)

    Émue par cette balade rêveuse, poétique et littéraire.. Un hymne magnifique !
    Bravo, merci.

  • #9

    Matin-Rouge (mercredi, 01 février 2017 20:20)

    Bonsoir Delphine,

    "Je suis de mon enfance comme d'un pays" disait Antoine de Saint-Exupéry
    Il n'est en ce monde aucun lieu qui ne me soit plus précieux.
    À mon tour, donc, d'être émue par votre commentaire.
    Merci. Beaucoup.

    Aurore

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